OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Monopole sur les idées http://owni.fr/2012/10/02/monopole-sur-les-idees-brevet-logiciel-interview-richard-stallman/ http://owni.fr/2012/10/02/monopole-sur-les-idees-brevet-logiciel-interview-richard-stallman/#comments Tue, 02 Oct 2012 10:57:40 +0000 Sabine Blanc et Ophelia Noor http://owni.fr/?p=121461

Richard Stallman dans la rédaction d'Owni.fr le 1er octobre 2012 - (cc) Ophelia Noor

Le brevet logiciel est un enjeu important pour les libertés numériques et l’économie mais malheureusement moins mobilisateur pour le grand public que la Hadopi ou Acta, en dépit du spectaculaire conflit qui oppose Apple et Samsung.

C’est dans une relative indifférence que le projet est de retour au niveau européen, via un texte sur le brevet unitaire visant à unifier le système des brevets dans l’UE. La commission des affaires juridiques (JURI) en discutera le 11 octobre puis négociera avec le conseil avant le vote final. Le monde du logiciel libre est sur le pied de guerre pour dénoncer une remise à plat du système actuel dans le mauvais sens, avec une campagne de lobbying menée par l’association April.

Richard Stallman, précieux radoteur

Richard Stallman, précieux radoteur

Le pape du logiciel libre a donné une conférence ce jeudi à Paris sur le thème ”Logiciels libres et droits de ...

Complexe, la question de la brevetabilité du logiciel divise encore. Ils sont interdits dans les pays signataires de la convention sur le brevet européen de 1973, dites convention de Munich, approuvé par tous les pays de l’UE. Avec plus ou moins de laxisme d’un pays à l’autre. Dans les faits, le contesté Office européen des brevets (OEB) en a déjà attribué. Et dans tous les cas, le code est soumis au droit d’auteur.

Pour sensibiliser sur ce sujet, le gourou du logiciel libre Richard Stallman donnera une conférence ce mercredi à à l’ESIEA à Paris à partir de 19 heures, vêtu de son costume de lobbyiste à sa sauce un peu nerd lunatique. Nous lui avons demandé d’éclaircir les enjeux. Et nous avons aussi un peu trollé, des deux côtés.

Le brevet logiciel, c’est une lutte des partisans du libre ? Ou dépasse-elle ce milieu ?

Chaque brevet est un monopole imposé sur l’utilisation d’une idée. Avec un brevet informatique, n’importe quel programme peut être interdit. Tout développeur est une victime potentielle des brevets informatiques. Ils servent aussi à interdire des objets physiques mais c’est autre chose. Car fabriquer un objet physique avec des circuits est beaucoup plus difficile, cela exige une entreprise plus grande, il y a donc moins de brevets applicables.

Les non-développeurs sont aussi restreints car sans savoir coder, on peut assembler des programmes, la combinaison peut être brevetée. Il y a des actions que presque tout le monde fait, comme écouter un fichier mp3, mais le mp3 est breveté et tout programme qui n’a pas l’autorisation d’utiliser des fichiers mp3 peut être sanctionné. Il y a le risque de ne pas trouver un programme à utiliser ou seulement de mauvaise qualité.

Et les entreprises qui ont fait le choix du logiciel propriétaire…

[Il nous coupe] Privateur.

… du logiciel privateur sont aussi concernées ?

Oui, elles sont aussi en danger. Les utilisateurs commerciaux peuvent aussi être pris dans un procès. N’importe quelle personne faisant de l’informatique est plus ou moins en danger. Le danger est surtout grave dans ce domaine car on agrège beaucoup d’idées dans un programme, un grand programme peut facilement implémenter des milliers d’idées. Si 10% des idées sont brevetées, cela signifie des centaines de procès potentiels contre le développeur, les distributeurs, les utilisateurs commerciaux.

Voilà huit ans, un avocat américain a étudié le noyau Linux utilisé dans le système d’exploitation GNU et Linux. Il a trouvé 283 brevets informatiques qui seraient violés par ce code. Une revue a publié dans le même temps que le noyau faisait environ 0,25 du système entier, soit 100 000 procès potentiels.

Pour vous, les brevets logiciels sont “le plus grand danger qui menacent le logiciel libre”. Que mettent-ils en danger précisément pour la communauté du libre ?

Le danger est qu’un programme libre ne soit plus disponible pour le public, chassé par des menaces de procès ou même qu’il ne sorte pas. S’il sort, il pourrait être attaqué après. Par exemple le premier programme libre capable de gérer les fichiers mp3, BladeEnc, a été éliminé par une menace de brevet. Aujourd’hui, nous avons des programmes libres qui sont distribués, mais pas partout, entre les distributions GNU et Linux. Beaucoup ne les offrent pas par peur des procès. Donc elles ne contiennent rien ou un programme privateur injuste.

Quelle est votre “plan de bataille” ? Êtes-vous optimiste ?

Il est difficile d’avoir un plan de bataille car l’ennemi est plus puissant, nous devons réagir aux attaques. Il repousse toujours les plans, cela nous laisse du délai, ce qui est bon. Mais c’est lui qui choisit le calendrier, pas nous. Mais je ne suis pas le général en chef, j’essaye d’aider ceux qui s’en occupent en Europe. J’apporte mon concours en faisant des conférences, des entretiens…

Avec qui ?

C’est une question absurde !

Vous pouvez vous entretenir avec des eurodéputés pour faire du lobbying…

Non, je ne les vois pas souvent, je le ferais s’ils voulaient. Je viens de donner des conférences à Bruxelles mais le Parlement n’était pas là.

Êtes-vous confiant ?

Je suis pessimiste par nature. Mais qu’importe mon point de vue, le résultat dépend de vous, de votre volonté de lutter. Cette tendance chez les journalistes à poser des questions sur le futur est une erreur. Il ne faut pas demander comment sera l’avenir mais comment pouvons-nous nous assurer un bon futur.

On publie des interviews pour exposer votre point de vue…

Oui, cela peut aider, mais comment sera le futur, bien sûr je ne sais pas. Mais maintenant, il est impossible de ne pas voir le danger avec tous ces grands procès sur de nombreux brevets entre les plus grands fabricants du monde. C’est la fin de la drôle de guerre, c’est la vraie guerre que nous avions prévue il y 20 ans.

De quelle législation l’UE devrait-elle s’inspirer ?

Je proposerai une loi pour que les programmes ne soient pas sujets aux brevets, quels que soient les brevets et que ce soit dans le développement, la distribution ou l’exécution. C’est la solution complète. L’Office européen des brevets a déjà octroyé beaucoup de brevets informatiques et estime qu’ils sont valables. Que faire ? Il y a deux options. On peut légiférer contre l’octroi de brevet et dans ce cas, il reste les brevets existants qui ont une durée de vie de 20 ans. Cette solution serait efficace mais il faudrait attendre longtemps.

Ma solution résoudrait immédiatement le problème. Les entreprises qui ont déjà déposé des brevets pourraient toujours faire des brevets sur les implémentations fixes sur des circuits de la même idée mais pas contre l’utilisation des ordinateurs généraux.

Il est difficile de comprendre ce sujet pour les non informaticiens. Ils supposent que les brevets fonctionnent comme le droit d’auteur mais en plus fort. C’est une conception nébuleuse et fausse. Ils s’imaginent cela à cause de l’expression idiote de “propriété intellectuelle” qui essaye de généraliser au droit d’auteur les brevets plus ou moins dits d’autre lois qui n’ont rien à voir dans la pratique. Ils pensent à tort que ces lois présentent un point commun important.

Richard Stallman dans la rédation d'Owni le 1er octobre 2012 -(cc) Ophelia Noor

Si vous écrivez un programme, le droit d’auteur vous appartient dessus, vous ne pouvez pas copier le code d’un autre programme privateur, et comment le copier sans le voir ? Donc vous ne courez pas le risque d’un procès pour violation du droit d’auteur. Mais les idées que vous avez implémentées dans votre code peuvent facilement être brevetées par d’autres. Or vous pouvez avoir la même idée indépendamment, ou en entendre parler, il y a beaucoup de manière d’implémenter une idée déjà brevetée par une autre personne. Le brevet met en danger celui qui écrit le code, contrairement au droit d’auteur.

J’utilise l’analogie entre les programmes et les symphonies. La symphonie est une œuvre assez grande qui contient beaucoup de notes et implémente beaucoup d’idées ensemble. Mais pour implémenter les idées musicales, il ne suffit pas de dresser une liste d’idées et de la présenter. Il faut écrire la partition, choisir beaucoup de notes, c’est l’étape difficile qui exige du talent.

Imaginons qu’au XVIIIe siècle des États européens aient voulu promouvoir le progrès de la musique symphonique en imposant un système de brevets musicaux : sur la forme d’un mouvement, un motif mélodique, rythmique, une série d’accords, l’utilisation de tels instruments ensemble. Vous êtes Beethoven et vous voulez composer une symphonie, il serait plus difficile de le faire de façon à éviter un procès que de produire une belle œuvre. Même un génie ne peut pas ne pas utiliser des idées déjà anciennes. C’est la même chose dans l’informatique.

Plus de 450 entreprises ont signé une lettre pour s’opposer au projet de brevet unitaire et au brevet logiciel. Parmi les acteurs concernés, qui est pour, qui est contre ?

Je ne sais pas, mais Twitter a fait quelque chose de très intéressant : le contrat des employés indique qu’ils doivent se limiter à des brevets défensifs, c’est une avancée, cela montre que n’importe quelle entreprise peut le faire. Voilà 20 ans que je propose cela. Beaucoup d’entreprises demandent à leurs employés de déposer des brevets. Mais comment savoir que dans 10 ans ce brevet n’appartiendra pas à un troll ou Apple et ne sera pas utilisé à des fins agressives ?

Avez-vous le sentiment que la politique menée par la nouvelle majorité de gauche en matière de libertés numériques et de partage de la culture est meilleure que celle de l’ancienne majorité ?

Il serait très difficile de faire pire ! J’ai entendu dire qu’ils pensent supprimer la Hadopi, ce serait très bien car la Hadopi est l’ennemi des droits de l’homme. Tant qu’elle existe, les citoyens français ont le devoir de maintenir des réseaux sans mots de passe (Richard Stallman déteste les mots de passe dans l’absolu, NDLR). C’est une forme de résistance contre l’enrôlement forcé comme soldat dans la guerre injuste contre le partage.

Lors de votre conférence à la Villette ce week-end, vous avez dit, entre autres, “Seuls des hommes sans principes sont prêts à sacrifier leur liberté pour un peu de commodité”. Pensez-vous que ce soit le bon argument pour convaincre ma mère de passer au logiciel libre ?

Oui ! D’abord, que fait votre mère, je ne la connais pas, est-elle informaticienne ?

Non, il n’y a pas beaucoup de mamans informaticiennes…

Oui, dans les années 60, il y en avait… Seuls les arguments éthiques peuvent avoir une influence sur ceux qui ne sont pas intéressés par la technique. Pas besoin d’être technicien pour comprendre le pouvoir injuste dans la vie. Dans le logiciel, il n’y a que deux possibilités pour les utilisateurs : soit ils ont le contrôle du programme, soit le programme les contrôle. Le premier cas s’appelle le logiciel libre, les utilisateurs disposent des quatre libertés essentielles (exécuter le programme, l’étudier et l’adapter à ses besoins, le redistribuer, l’améliorer et en faire bénéficier la communauté, NDLR) le second est le logiciel privateur.

Mais si j’explique ça à ma maman, elle va me dire “ok mais mon logiciel (privateur) marche, le reste m’importe peu”…

Mais sait-elle ce qu’il fait ? Le logiciel privateur vous espionne, vous restreint délibérément, contient des portes dérobées capables d’attaquer les utilisateurs. Et beaucoup sont capables de comprendre l’injustice de ce fonctionnement car ils peuvent regarder plus loin et plus profond que leur commodité à court terme. Mais d’autres n’en sont pas capables et ils sont perdus pour les droits de l’homme.

Il me semble que cette question cherche à démontrer qu’il est impossible de convaincre les gens de protéger n’importe quelle liberté. Ce sont des questions idiotes, pourquoi me poser des questions avec des préjugés. C’est supposé que les gens sont bêtes.

[On essaye de lui expliquer qu'on émet juste un bémol sur l'efficacité de son argumentation, que notre maman ne se préoccupe pas trop des backdoors et autre fonctionnalités malignes.]

Mais ça marche, vous supposez que votre mère est bête, je ne veux pas supposer cela.

Non, je vous dis juste quelle serait sa réaction, elle ferait la balance entre les avantages et les inconvénients… […]

Vous connaissez votre mère… Peut-être est-elle bête. Mais pas toutes les mères. Je rejette cette question qui a un préjugé faux.

Vous êtes optimiste…

Non. Beaucoup de non-informaticiens comprennent l’enjeu, ne me dites pas le contraire. S’ils ne sont pas habitués à penser en ces termes, ils peuvent apprendre en écoutant des discours qui prêtent de l’importance à l’éthique et aux droits de l’homme.

On va parler de l’open hardware, pour finir…

Je ne veux pas de question sur open n’importe quoi… [Avant d'interviewer Richard Stallman, il faut promettre de ne pas l'associer à l'open source, NDLR]. J’exige que l’article parle de hardware libre. Ce sont deux philosophies différentes.

MakerBot s’est fait critiqué avec sa Replicator 2 qui ne serait pas libre. Le parallèle avec ce qui s’est passé dans le monde du logiciel vient immédiatement à l’esprit, vous semble-t-il juste ?

C’est une confusion. MakerBot utilise des programmes privateurs dans l’imprimante, c’est la même question. Évidemment c’est mal, nous allons le critiquer bientôt. Et nous allons faire une annonce sur une imprimante qui n’utilise que du logiciel libre, un fabricant a demandé notre approbation.


Interview réalisée à la soucoupe Owni par Sabine Blanc et Ophelia Noor avec Richard Stallman speaking french oui oui. Photo Ophelia Noor.

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Richard Stallman, précieux radoteur http://owni.fr/2012/06/29/richard-stallman-precieux-radoteur/ http://owni.fr/2012/06/29/richard-stallman-precieux-radoteur/#comments Fri, 29 Jun 2012 12:32:28 +0000 Sabine Blanc et Ophelia Noor http://owni.fr/?p=114848

Richard Stallman à La Mutinerie Coworking à Paris, le 28 juin 2012 - (cc) Ophelia Noor

La Mutinerie, ses flamboyantes tentures rouges et son coffre de pirate en guise de table : l’espace parisien de co-working était tout désigné pour accueillir la conférence de Richard Stallman, hacker mythique qui a initié le mouvement du logiciel libre, sur le thème ”Logiciels libres et droits de l’Homme”. Une initiative des ONG la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH) et Reporters sans frontières (RSF), de leurs amis du cluster de hackers Telecomix, de Silicon Maniacs, avec le soutien de l’agence de communication LIMITE.

Drones d’intérêt général

Drones d’intérêt général

Des drones fabriqués en Bretagne pour équiper les opposants syriens, les aider à communiquer entre eux et témoigner des ...

En mode automatique, Richard Matthew Stallman, rms pour les intimes, a délivré son laïus habituel, devant un public acquis. Le même depuis presque trente ans, lorsqu’il claqua la porte du laboratoire d’intelligence artificielle du MIT en 1983 pour développer GNU, un OS dont le code est ouvert, en réaction à la logique propriétaire de plus en plus prégnante, gros sous oblige. Un retour à la nature originelle des logiciels puisque, on l’oublie souvent, les programmes ont d’abord été libres par défaut. Dans la foulée, la Free Software Foundation (FSF) est créée pour soutenir le projet.

(deliver Guru (clone SPEECH_FROM_30_YEARS_AGO)

Plus qu’un paramètre technique, l’ouverture du code est pour Richard Stallman une véritable philosophie. Il la résume en trois petits mots qui nous sont familiers, rappelé en ouverture, dans un français impeccable :

Liberté, égalité, fraternité.

Un triptyque d’où découlent quatre obligations, “quatre nouveaux droits de l’homme”, dans une société où l’informatique joue un rôle central : liberté d’utiliser le logiciel, de l’étudier, de le modifier et de le redistribuer. Mais aussi une quadruple obligation que doit respecter un programme pour pouvoir prétendre à une des licences labellisées “libre”.

Conférence de Richard Stallman sur les logiciels libres et les droits de l

Stallman est bien sûr agaçant par son côté sectaire, son intransigeance, qui consiste à démonter méthodiquement les outils que la plupart des gens utilisent au quotidien, en ignorant (faisant semblant de ?) que l’utilisateur lambda se contrefiche de savoir que Microsoft a mis des portes dérobées (backdoors) pour modifier Windows, ce “malware universel”,  ou qu’il ne peut pas tripatouiller le code, tant que ses besoins sont satisfaits. Lassant encore quand il file, as usual, la petite claque à Linux, l’OS libre à succès développé par Linus Torvalds et la grosse baffe à l’open source, avatar marketé parfois moins pointilleux sur les licences, qui a commis le crime de mettre en avant l’efficience des outils libres plutôt que l’éthique.

Richard Stallman joue d’ailleurs de cette étiquette en tonnant à moult reprises “parlez plus fort, je n’entends pas” (il est sourd comme un pot), ou en endossant le costume de Saint iGNUcius :

Saint iGNUcius, de l’Eglise d’Emacs
Je bénis ton ordinateur
Nous adorons le seul vrai éditeur d’Emacs
Tu dois prononcer la confession de foi :
Il n’y a aucun autre système que Gnu et Linux est un de ses noyaux

Richard Stallman, transformation en Saint iGNUcius avec la robe et l

Si l’homme occidental moderne fait furieusement penser au Discours de la servitude volontaire, de la Boétie, c’est somme toute son problème. En revanche, quand la liberté de communiquer, voire des vies, sont en danger, l’argument du “contrôle du logiciel sur l’utilisateur” pèse d’un poids nouveau. Et malheureusement, la surveillance du réseau s’accroit, comme l’a rappelé Antoine Bernard, le directeur général de la FIDH :

En Colombie, le président Uribe s’est livré à de l’espionnage sous couvert d’une procédure anti-terroriste. Des défenseurs des droits de l’homme, des magistrats, des policiers, ont été poursuivis jusqu’en Europe, leurs communications ont été interceptées.

Lui-même s’est fait tacler par rms pour utiliser Skype. Le bien pratique logiciel est troué comme une passoire et il a servi à espionner les opposants syriens grâce à un mouchard. Et ce n’est qu’un exemple.

Dès lors, il était logique de “connecter le monde du libre et des droits de l’homme”. La FIDH a “intégré l’enjeu depuis 2000″, les logiciels libres ont été installés, “non sans peine” car il est difficile de tourner le dos au “confort fallacieux de certains logiciels”, pour reprendre les termes de Nicolas Diaz, le webmaster de la FIDH. RSF, qui défend également des blogueurs et netcitoyens, souhaite aussi “engager plus la communauté du libre”.

“Bull éclatez”

Impossible de ne pas évoquer le cas d’Amesys, cette filiale de l’entreprise française Bull qui a vendu des systèmes de surveillance à des dictatures. La dualité de la technologie a bon dos, quand il s’agit de faire du chiffre d’affaires. La FIDH et la LDH ont déjà eu la satisfaction de voir que leur plainte déposée cet automne visant la société pour complicité d’actes de torture en Libye a permis l’ouverture d’une information judiciaire.

Gnu contre le taureau, Richard Stallman était symboliquement entré dans l’arène au printemps lors d’un séjour en Tunisie, le temps d’un happening, prouvant que le vieil oncle radoteur est aussi un gardien sacrément vigilant :

Cliquer ici pour voir la vidéo.


Photographies par Ophelia Noor pour Owni

Owni a publié en ebook sur Amsesys, Au pays de Candy, enquête sur les marchands d’armes de surveillance numérique

Nos confrères des Inrockuptibles ont demandé à Richard Stallman de conseiller François Hollande. Dommage que les équipes du cabinet de la nouvelle ministre de la Culture Aurélie Filippetti soient déjà constituées, avec un certain tropisme hadopiesque.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

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http://owni.fr/2012/06/29/richard-stallman-precieux-radoteur/feed/ 26
L’innovation bridée par l’abus de contrôle? http://owni.fr/2011/02/17/quelle-criteres-pour-la-possession-didees/ http://owni.fr/2011/02/17/quelle-criteres-pour-la-possession-didees/#comments Thu, 17 Feb 2011 10:36:22 +0000 Framablog http://owni.fr/?p=30366 Richard Stallman est ce que l’on appelle un virtuose du code. Il est un fervent défenseur du logiciel libre et à l’origine du projet GNU. Dans cette video sous-titrée par Framablog, il va au bout de la notion de propriété intellectuelle et démontre comment un compositeur serait bridé si chaque motif rythmique ou mélodique était déposé.

Attention: ceci ne présente aucune solution. It’s just funny! Imagine.


Dans cette courte séquence vidéo, extraite du film Patent Absurdity, que nous vous présentons aujourd’hui sous-titrée par nos soins, Richard Stallman nous alerte par analogie sur les dangers que représentent les brevets appliqués aux logiciels. Et si Beethoven avait été confronté en son temps à un système de brevets sur la musique ?

Cette séquence nous renseigne à double titre.

D’une part, la pertinente démonstration nous fait toucher du doigt les dangers du brevet logiciel dont le principe a été maintes fois repoussé en Europe mais qui menace toujours. Pour en savoir plus sur le sujet, nous ne saurions que trop vous conseiller de lire la synthèse que vient de publier l’April.

D’autre part, pour qui connaît un peu le bonhomme et son histoire (lire à ce sujet le framabook « Richard Stallman et la révolution du logiciel libre – Une biographie autorisée »), on imagine sans peine la frustration qu’un système de brevets logiciels – en vigueur aux États-Unis – peut engendrer. Richard Stallman est un hacker reconnu, c’est-à-dire un virtuose du code, et l’on peut alors parler d’un art de la programmation. Un art qui a eu ses Beethoven et qui souhaite continuer à en avoir encore demain.

Article initialement publié sur : Framablog sous le titre “Breveter des logiciels? Beethoven ne l’aurait pas entendu de cette oreille”.

Crédits photos CC flickr: dunechaser, tomswift

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“La guerre contre le partage doit cesser” par Richard Stallman http://owni.fr/2009/09/10/la-guerre-contre-le-partage-doit-cesser-par-richard-stallman/ http://owni.fr/2009/09/10/la-guerre-contre-le-partage-doit-cesser-par-richard-stallman/#comments Thu, 10 Sep 2009 10:12:55 +0000 zoupic http://owni.fr/?p=3447 Trouvé sur le site de framablog, originellement posté sur son blog perso, publié sous licence CC 3.0, je reproduis donc ici intégralement le texte.

Richard Stallman - GNU Crédit photo: Tiago Tavares

Richard Stallman - GNU - Free Software Foundation

Ending the War on Sharing

Richard Stallman – Septembre 2009 – Site personnel
(Traduction Framalang : Claude et Goofy)

Quand les maisons de disques font toute une histoire autour du danger du « piratage », elles ne parlent pas d’attaques violentes de navires. Elles se plaignent du partage de copies de musique, une activité à laquelle participent des millions de personnes dans un esprit de coopération. Le terme « piratage » est utilisé par les maisons de disques pour diaboliser le partage et la coopération en les comparant à un enlèvement,un meurtre ou un vol.

Le copyright (NdT : Pour des questions de non correspondance juridique nous avons choisi de ne pas traduire copyright par droit d’auteur) a été mis en place lorsque la presse imprimée a fait de la copie un produit de masse, le plus souvent à des fins commerciales. Le copyright était acceptable dans ce contexte technologique car il servait à réguler la production industrielle, ne restreignant pas les lecteurs ou (plus tard) les auditeurs de musique.

Dans les années 1890, les maisons de disques commencèrent à vendre des enregistrements musicaux produits en série. Ceux-ci facilitèrent le plaisir de la musique et ne furent pas un obstacle à son écoute. Le copyright sur ces enregistrements était en général peu sujet à controverse dans la mesure où il ne restreignait que les maisons de disques mais pas les auditeurs.

La technique numérique d’aujourd’hui permet à chacun de faire et partager des copies. Les maisons de disques cherchent maintenant à utiliser les lois sur le copyright pour nous refuser l’utilisation de cette avancée technologique. La loi, acceptable quand elle ne restreignait que les éditeurs, est maintenant une injustice car elle interdit la coopération entre citoyens.

Empêcher les gens de partager s’oppose à la nature humaine, aussi la propagande orwellienne du « partager, c’est voler » tombe-t-elle généralement dans l’oreille de sourds. Il semble que le seule manière d’empêcher les gens de partager soit une guerre rude contre le partage. Ainsi, les maisons de disques, au moyen de leurs armes légales comme la RIAA (NdT : RIAA : Recording Industry Association of America), poursuivent en justice des adolescents, leur demandant des centaines de milliers de dollars, pour avoir partagé. Au même moment, des coalitions d’entreprises, en vue de restreindre l’accès du public à la technologie, ont développé des systèmes de Gestion de Droits Numériques (NdT : Systèmes anti-copie ou DRM : Digital Restrictions Management) pensés pour menotter les utilisateurs et rendre les copies impossibles : les exemples incluent iTunes ou encore les disques DVD et Blueray (voir DefectiveByDesign.org pour plus d’informations). Quoique ces coalitions opèrent dans le cadre des clauses de non-concurrence, les gouvernements oublient systématiquement de les poursuivre légalement.

Le partage continue malgré ces mesures, l’être humain ayant un très fort désir de partage. En conséquence, les maisons de disques et autres éditeurs demandent des mesures toujours plus dures pour châtier les partageurs. Ainsi les États-Unis ont voté une loi en octobre 2008 afin de saisir les ordinateurs utilisés pour le partage interdit. L’union Européenne envisage une directive afin de couper l’accès à Internet aux personnes accusées (pas condamnées) de partage : voir laquadrature.net si vous souhaitez aider et vous opposer à cela. La Nouvelle-Zélande a déjà adopté une telle loi en 2008.

Au cours d’une récente conférence, j’ai entendu une proposition demandant que les gens prouvent leur identité afin d’accéder à Internet : une telle surveillance aiderait aussi à écraser la dissidence et la démocratie. La Chine a annoncé une telle politique pour les cybercafés : l’Europe lui emboitera-t-elle le pas ? Un premier ministre au Royaume-Uni a proposé d’emprisonner dix ans les personnes en cas de partage. Ce n’est toujours pas appliqué… pour le moment. Pendant ce temps, au Mexique, les enfants sont invités à dénoncer leurs propres parents, dans le meilleur style soviétique, pour des copies non-autorisées. Il semble qu’il n’y ait pas de limite à la cruauté proposée par l’industrie du copyright dans sa guerre au partage.

Le principal argument des maisons de disques, en vue de l’interdiction du partage, est que cela cause des pertes d’emplois. Cette assertion se révèle n’être que pure hypothèse[2]. Et même en admettant qu’elle soit vraie, cela ne justifierait pas la guerre au partage. Devrions-nous empêcher les gens de nettoyer leurs maisons pour éviter la perte d’emplois de concierges ? Empêcher les gens de cuisiner ou empêcher le partage de recettes afin d’éviter des pertes d’emplois dans la restauration ? De tels arguments sont absurdes parce que le remède est radicalement plus nocif que la maladie.

Les maisons de disques prétendent aussi que le partage de musique ôte de l’argent aux musiciens. Voilà une sorte de demi-vérité pire qu’un mensonge : on n’y trouve même pas une vraie moitié de vérité.
Car même en admettant leur supposition que vous auriez acheté sinon un exemplaire de la même musique (généralement faux, mais parfois vrai), c’est seulement si les musiciens sont des célébrités établies depuis longtemps qu’ils gagneront de l’argent suite à votre achat. Les maisons de disques intimident les musiciens, au début de leur carrière, par des contrats abusifs les liant pour cinq ou sept albums. Il est rarissime qu’un enregistrement, sous incidence de ces contrats, vende suffisamment d’exemplaires pour rapporter un centime à son auteur. Pour plus de détails, suivez ce lien. Abstraction faite des célébrités bien établies, le partage ne fait que réduire le revenu que les industriels du disque vont dépenser en procès intentés aux amateurs de musique.

Quant aux quelques musiciens qui ne sont pas exploités par leurs contrats, les célébrités bien assises, ce n’est pas un problème particulier pour la société ou la musique si elles deviennent un peu moins riches. Il n’y a aucune justification à la guerre au partage. Nous, le public, devrions y mettre un terme.

Certains prétendent que les maisons de disques ne réussiront jamais à empêcher les gens de partager, que cela est tout simplement impossible[3]. Etant données les forces asymétriques des lobbyistes des maisons de disques et des amateurs de musique, je me méfie des prédictions sur l’issue de cette guerre ; en tout cas, c’est folie de sous-estimer l’ennemi. Nous devons supposer que chaque camp peut gagner et que le dénouement dépend de nous.

De plus, même si les maisons de disques ne réussiront jamais à étouffer la coopération humaine, elles causent déjà aujourd’hui énormément de dégâts, juste en s’y essayant, avec l’intention d’en générer davantage demain. Plutôt que de les laisser continuer cette guerre au partage jusqu’à ce qu’ils admettent sa futilité, nous devons les arrêter aussi vite que possible. Nous devons légaliser le partage.

Certains disent que la société en réseau n’a plus besoin de maisons de disques. Je n’adhère pas à cette position. Je ne paierai jamais pour un téléchargement de musique tant que je ne pourrais pas le faire anonymement, je veux donc être capable d’acheter des CDs anonymement dans une boutique. Je ne souhaite pas la disparition des maisons de disques en général, mais je n’abandonnerai pas ma liberté pour qu’elles puissent continuer.

Le but du copyright (sur des enregistrements musicaux ou toute autre chose) est simple : encourager l’écriture et l’art. C’est un but séduisant mais il y a des limites à sa justification. Empêcher les gens de pratiquer le partage sans but commercial, c’est tout simplement abusif. Si nous voulons promouvoir la musique à l’âge des réseaux informatiques, nous devons choisir des méthodes correspondant à ce que nous voulons faire avec la musique, et ceci comprend le partage.

Voici quelques suggestions à propos de ce que nous pourrions faire :

  • Les fans d’un certain style de musique pourraient organiser des fans clubs qui aideraient les gens aimant cette musique.
  • Nous pourrions augmenter les fonds des programmes gouvernementaux existants qui subventionnent les concerts et autres représentations publiques.
  • Les artistes pourraient financer leurs projets artistiques coûteux par des souscriptions, les fonds devant être remboursés si rien n’est fait.
  • De nombreux musiciens obtiennent plus d’argent des produits dérivés que des enregistrements. S’ils adoptent cette voie, ils n’ont aucune raison de restreindre la copie, bien au contraire.
  • Nous pourrions soutenir les artistes musiciens par des fonds publics distribués directement en fonction de la racine cubique de leur popularité. Utiliser la racine cubique signifie que, si la célébrité A est 1000 fois plus populaire que l’artiste chevronné B, A touchera 10 fois plus que B. Cette manière de partager l’argent est une façon efficace de promouvoir une grande diversité de musique.
    La loi devrait s’assurer que les labels de disques ne pourront pas confisquer ces sommes à l’artiste, l’expérience montrant qu’elles vont essayer de le faire. Parler de « compensation » des « détenteurs de droits » est une manière voilée de proposer de donner l’essentiel de l’argent aux maisons de disques, au nom des artistes.
    Ces fonds pourraient venir du budget général, ou d’une taxe spéciale sur quelque chose liée plus ou moins directement à l’écoute de musique, telle que disques vierges ou connexion internet.
  • Soutenir l’artiste par des paiements volontaires. Cela fonctionne déjà plutôt bien pour quelques artistes tels que Radiohead, Nine Inch nail (NdT : Voir cette vidéo) ou Jane Siberry (sheeba.ca), même en utilisant des systèmes peu pratiques qui obligent l’acheteur à avoir une carte de crédit.
    Si chaque amateur de musique pouvait payer avec une monnaie numérique (NdT : digital cash), si chaque lecteur de musique comportait un bouton sur lequel appuyer pour envoyer un euro à l’artiste qui a créé le morceau que vous écoutez, ne le pousseriez-vous pas occasionnellement, peut-être une fois par semaine ? Seuls les pauvres et les vrais radins refuseraient.

Vous avez peut-être d’autres bonnes idées. Soutenons les musiciens et légalisons le partage.

Copyright 2009 Richard Stallman
Cet article est sous licence Creative Commons Attribution Noderivs version 3.0

Notes

[1] Crédit photo : Wikimania2009 (Creative Commons By)

[2] Voir cet article, mais attention à son utilisation du terme de propagande « propriété intellectuelle », qui entretient la confusion en mettant dans le même panier des lois sans rapport. Voir ce lien et pourquoi il n’est jamais bon d’utiliser ce terme.

[3] Voir the-future-of-copyright.

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http://owni.fr/2009/09/10/la-guerre-contre-le-partage-doit-cesser-par-richard-stallman/feed/ 14